5- L'évolution, la religion et la philo...
Les découvertes scientifiques ont, au cours des derniers
siècles, bouleversé notre conception du monde. La
terre,
de centre de l'univers, est devenue une planète parmi
d'autres.
L'homme, de maître naturel de la Terre, est devenu un animal
parmi d'autres.
Il est maintenant impossible de considérer le monde comme
une
création à notre intention, un grand jardin
d'enfant.
Nous sommes obligés de voir la réalité
: le monde ne nous appartient pas plus qu'aux autres êtres
vivants.
Pire : non seulement nous sommes des animaux parmi d'autres,
mais en
plus nous ne sommes que des "avatars", des "sacs" destinés
à la seule reproduction de nos gènes!
Qu'en est-il de notre responsabilité dans ce monde, du sens
de notre vie?
Eh bien, plus que jamais, c'est à nous de le
décider.
5-1 Petite discussion autour du libre arbitre et du
déterminisme.
Nous autres, être vivants, sommes
déterminés par
deux ensembles de facteurs. "L'histoire de l'espèce", ou les
gènes, modelés par des millions
d'années
d'évolution, et notre "histoire individuelle", c'est
à
dire notre environnement.
Où se situe notre liberté dans tout cela?
Beaucoup de personnes sont révulsées à
l'idée que leurs comportements puissent avoir une origine
génétique. Pourtant, il faut regarder les choses
en face
: nos comportements, nos pensées, trouvent leur origine dans
notre cerveau. Il suffit de voir l'impact de certaines maladies (ou
substances!) sur notre raison pour le voir.
Ce cerveau, sa structure est déterminée
à la base par nos gènes.
Mais... le cerveau est aussi très plastique. Il est capable
de
se réparer, dans une certaine mesure... Et surtout, il est
capable d'apprendre, c'est à dire de s'adapter, de
répondre à l'environnement, non pas d'une
génération à l'autre, mais au cours
d'une seule vie!
Oh ce n'est pas unique chez les animaux. Tout le monde est capable
d'apprendre, même les mouches.
Cette capacité d'apprentissage, d'où vient-elle?
De nos
gènes. Ce sont eux qui codent pour la plasticité
de notre
cerveau, et qui nous donnent ainsi nos capacités
d'innovation et
d'adaptation. Vu sous cet angles, nos gènes codent pour un certain
libre arbitre.
Nous ne sommes donc pas uniquement tributaires de notre
environnement... C'est plutôt rassurant, non?
Cependant... Attention, certains de nos comportements sont
peut-être moins plastiques que d'autres... L'important serait
alors de connaître les limites de notre plasticité, non
seulement en tant qu'individus, mais aussi en tant qu'espèce.
Comment le savoir? En les étudiant, ce que font notamment les
spécialistes d'écologie comportementale. Prendre
conscience de ses limites, c'est le seul espoir de pouvoir, si besoin,
les repousser.
5-2 Et notre responsabilité alors?
Vous sentez vous moins responsables maintenant qu'avant d'avoir lu ce
texte? Aimez
vous moins vos proches et vos enfants? J'espère bien que
non!!
Savoir que la sensation sucrée du gâteau dans ma
bouche
n'est qu'un interprétation de mon cerveau n'a jamais
diminué mon plaisir de savourer un dessert... ;)
Notre responsabilité... Eh bien, elle n'a pas
changé, c'est toujours à nous d'en
décider!
"Et la morale?"
Ah la morale... Tout le monde en a une, mais c'est rarement la
même que celle du voisin. Cette façon que nous
avons, nous
les humains, de vouloir à tout pris former des groupes unis
par
une même morale a sans doute même une certaine
origine
génétique. Il est possible même que cette morale
soit un des piliers de notre capacité à former des
groupes qui ne soient pas uniquement familiaux... Et si l'on
considère que les groupes sociaux les mieux unis sont les plus
aptes à survivre quand les conditions deviennent difficiles
(famines, par exemple, car l'entraide peut favoriser la survie)... on
peut comprendre comment la capacité à élaborer une
morale pourrait avoir été sélectionnée.
Disons que nous avons tendance à élaborer une
morale... Mais que son contenu demeure libre, du moment qu'elle permet
aux individus de former des groupes sociaux. De la même
manière, nous avons des capacités d'apprentissage, mais
ce que nous apprenons dépend de notre culture et de notre
histoire personnelle.
"Et la religion?"
Personne ne pourra jamais démontrer l'existence ou
l'absence de Dieu.
Par contre, il n'y a pas eu besoin d'attendre Darwin pour comprendre
qu'interpréter la Bible ou n'importe quelle "histoire du
Monde"
religieuse au pied de la lettre n'était peut-être
pas
très intelligent... Ce qui ne retire rien à la
portée philosophique de ces textes, bien entendu.
Mais l'étude de l'évolution apporte bien d'autres
choses,
dans le domaine des religions. Elle permet d'étudier les
comportements religieux d'un oeil nouveau... Et si la tendance
naturelle des humains à former des groupes religieux, unis
par
des rituels plus ou moins coûteux pour les individus, mais
solidaires dans l'adversité (cette solidarité pouvant
justement être mise à l'épreuve par le coût
des rituels), avait
une
base génétique?
5-3 Bon, mais un "sac de gènes"? Merci bien!
Nous pouvons fermer les yeux, et faire comme si nous n'avions rien vu,
et continuer de nous considérer de purs esprits dans une
prison
de chair.
Nous pouvons aussi apprendre à nous connaître,
à nous comprendre, et à nous accepter.
Cet angle de vue ne rend pas nos poésies moins belles, nos jeux de mots moins drôles, ni nos fusées moins puissantes.
Par contre, il peut nous aider à bien des égards.
Si nos gènes déterminent certains de nos
comportements,
modelés par des millions d'années
d'évolution,
nous pouvons en prendre conscience pour, enfin, essayer d'agir en
connaissance de cause, et non plus simplement subir nos propres petits
travers, nos colères instinctives et nos
méfiances
irraisonnées.
Nous pouvons analyser nos comportements, et ceux de nos
contemporains,
avec un oeil nouveau. Nous pouvons aussi les relativiser, et
peut-être, en intégrant les apports
cumulés de
l'évolution, la psychologie et la neurobiologie, enfin les
comprendre.
Comme le disait Socrate : "Connais-toi toi-même"
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