Nicolas Malfin
interview réalisée en 2006
Bibliographie:
- Golden City
Le fait d'etre autodidacte t'a-t-il
permis d'insufler une maturation à ton dessin en terme de
temps ou aurais tu préféré avoir un
prof pour
aller plus vite?
C'est vrai que temps que c'était
un loisir, le coté autodidacte me plaisait beaucoup. Quand
j'ai commencé professionellement à travailler sur
la
BD, j'ai eu Olivier Vatine qui a regardé mmon travail, et
c'est vrai qu'il avait un regard sur mes dessins, où ses
critiques étaient très interessantes. Au bout de
qq
tps, je me suis rendu compte que j'avais avancé plus vite ds
mon évolution graphique que si je l'avais fait tout seul.
Parce que lui, il avait un regard neuf et extérieur sur mon
dessin. Il a mis tout de suite le doigts sur des points d'anatomie et
de perspective. Bon, j'avais déjà acquis
certaines
bases, mais après, c'est vrai que c'était une
histoire
de réglage. C'est très interessant qu'une
personne
extérieure vienne voir votre travail, en plus
j'étais
dans une période encore très scolaire, donc
j'étais
ouvert à la critique pour avancer. J'ai assez peu
d'égo,
en fait.
Le premier point sur lequel il avait
tiqué, c'était les visages que je faisais trop
gros. Je
ne le voyais pas au premier abord, et puis, en l'espace de dix
secondes, en me le disant, ça paraissait évident.
Quand
on est autodidacte, il faut beaucoup de tps pour se corriger. Il faut
regarder ses anciens dessins, voir l'évolution, mais on
apprend après, dans le métier, à avoir
du recul,
à avoir un oeil neuf, pour travailler plus vite.
Il y a plein de petites methodes : par
exemple, pour voir si le visage est bien proportionné, quand
on passe quatre heures à le dessiner, on sait qu'il y a un
truc qui ne va pas. Pour avoir un oeil neuf, soit on fait une
réduction du dessin en photocopie, soit on le regarde par
transparence, et là, on a un regard nouveau. Pomettes trop
hautes, menton trop fort etc. Et on le rectifie.
Quand on est autodidacte, c'est deux
mois plus tards qu'on le revoit.
Avoir une formation, je ne sais pas...
Je sais qu'Angoulème forme, mais c'est plus pour la mise en
scène. Visuellement, c'est un petit plus. J'ai beaucoup
apris
dans la mise en scène, car avant, c'était un peu
aléatoire. Or il y a des codes de mise en scène.
J'en
avais déjà acquis, à force de regarder
des
films, des séries, mais il m'en manquait. C'était
bien
d'avoir quelqu'un pour régenter tout ça, et
donner de
bonnes bases. Après c'est à soi meme de se donner
une
identité dans la mise en scène. Certains vont
beacoup
travailler avec des gros plans, d'autres très peu. Moi
j'essaye d'avoir quelque chose de très varié,
assez
scolaire au début, d'un plan éloigné,
puis
jusqu'à un gros plan. Ça reste aussi basique que
ça.
Mais après, il y a le cadrage, c'est toute un
éducation.
On ne peut pas regarder le Seigneur des Anneaux sans voir
l'incroyable cadrage que donne Peter Jackson pour mettre en valeur
une scène.
Je cherche à trouver un cadrage
le plus cinématographique possible.
Pour en revenir à ta
scolarité, pourquoi à tu choisi un voie
scientifique
après le bac?
En fait, ça fait partie de
l'époque. Je suis rentré au Collège
début
80, et lors de toutes les rencontres au CIO, on me disait
« il
faut des ingénieurs, des scientifiques ».
La France
en avait besoin....
On nous a tous blindés pour
suivre la « Voie Royale », le bac
C, la prépa,
l'école d'ingénieur, le diplôme.
Après on
avait un boulot. J'ai fais des études aussi pour rassurer
mes
parents. Ils se sentent responsables de nous, de notre avenir. Je
prenais les choses au sérieux quand j'étais
à
l'école, j'étais là pour travailler.
Moi meme
j'avais un peu peur de parler de la BD à mes parents. C'est
un
métier sur lequel les gens ont beaucoup d'apriori, encore
plus
avant qu'aujourd'hui. C'est vrai, j'ai joué la carte de la
confidentialité. Je me souviens au collège, il y
avait
tout un tas de petits livres que l'on pouvait consulter, sur les
métiers. Il avait celui sur le plombier, le
médecin...
et par hasard, j'avais trouvé celui sur le métier
de
dessinateur de BD. Ça m'a rassuré, mais
ça
restait quand meme qq chose d'assez
éloigné.C'était
un métier où il n'y avait pas de salaire
à la
fin du mois. Mes parents voulaient au moins un bac plus 5. Donc,
quand j'ai eu bac+5, j'ai essayé de faire autre chose. Je me
suis donné deux mois pour entrer dans le monde de la BD. Si
ça
ne marchait pas, ce n'était pas grave, j'avais ue
thèse
dans deux mois. J'ai préparé un projet de BD et
je l'ai
envoyé à plein d 'éditeurs, et puis
j'ai
attendu. Il y en a qq uns qui ont répondu, dont delcourt,
assez rapidement. Puis je me suis lancé sur le projet, et
à
un moment, il a fallut faire un choix. J'en avait plusieurs : d'un
coté, Golden City avec Becqueur et le label
« Série
B » chez Delcourt, et de l'autre, on m'avait
demandé
d'etre le dessinateur d'Alexis Alice sur Tomb Raider. Le premier, je
ne signais pas tout de suite, ce n'était pas sur. Le second,
je signais quasiment dans la foulée, et je partais pour
l'aventure. En plus de ça, il y avait le choix de la
thèse.
A un moment donné, je me suis dit que c'était
naturel
d'aller vers Golden City avec Vatine, car je savais que j'allais
apprendre qq chose d'Olivier. Et puis, pour Tomb Raider, ils ont
trouvé qq'un d'autre. La thèse, j'ai
laissé
tomber.
Je n'avais pas conscience du risque que
je prenais, car j'avais un bac+5 et je suis repartis de
zéro.
Mais le fait que j'ai eu de la reconnaissance dans mon travail de la
part de Vatine, meme si j'avais beaucoup de choses à
apprendre
et que l'éditeur état prêt à
signer avec
moi sur un projet sérieux, c'est qq chose qui m'a je pense
rassuré interieurement. J'ai donc foncé tete
baissée.
J'ai du mettre un an etr demi pour
faire le premier album. Ensuite, la sortie s'est faite à
Angoulème. Ce fut un moment très chaud, car je
n'avais
pas du tout l'hab itude des dédicaces. Pour moi, la BD,
c'était déssiner sur une planche pour faire un
album et
c'est tout. Je savais qu'il y avait des meeting, des rencontres avec
des éditeurs, mais je n'avais pas conscience que la BD
était
un tel buisness.
J'ai quand meme une consception assez
simpliste du boulot, or il y a plein de choses interessantes qui
gravitent autour, comme la rencontre du public. Il faut savoir les
gérer aussi parce que, pour moi par exemple, en
période
de bouclage, je peux passer des mois à vivre en ermite, avec
une vie très monastique, puis dès que l'album
sort,
c'est rush.On passe de convention en convention, on a plein
d'interviews, c'est assez interessants.
Ce n'était pas dur de
concilier des études assez soutenues et de continuer
à
travailler ton dessin?
Ce n'était pas évident
quand j'étais dans les études
supérieures. Tant
que j'étais au lycée, c'était beaucoup
plus
facile. En prépa, par exemle, je n'ai quasiment pas
dessiné.C'était un période
où, pendant un
an, je n'ai pas du tout vécu. Ç a
été une
année assez difficile, mais avec des apprentissages sur les
methodes de travail. Je m'en suis aperçu à la
fac, où
le rythme était complètement
différent. En un
an, j'avais développé des méthode de
travail
rapides, et ça c'était vraiment
précieux.
J'étais pas un bourru de
travail, mais je n'étais pas fumiste non plus.C'est vrai que
la prépa m'a appris à puiser en moi pour me
motiver à
bosser et je l'ai retrouvé en faisant de la B.D.Cet esprit
de
compétition avec soi meme par raaport aux délais
à
rendre sur les albums.On apprend àpuiser en soi pour
travailler plus longtemps.C'est un parcours que je ne regrette pas du
tout et si c'était à refaire je le referais.
Pendant
les cinq ans d'etudes supérieures j'ai appris à
faire
évoluer mon dessin et j'ai rencontré des
personnes que
j'aime beaucoup.En plus ça m'a donné une bonne
culture
générale que je continue d'enrichir.J'aime bien
la
science sous tous ses rapports:l'écologie, la biologie...Je
serais incapable de suivre un dossier de la revue
« la
recherche » comme à l'époque
de mon D.E.A.
mais je m'interresse toujours à la science en lisant
d'autres
revues comme « Science et Vie ».
Tu as fait aussi une incursion dans
le jeu de rôle et les cartes à jouer, comment cela
est-il arrivé?
J'ai dessiné un jeux de cartes
« les pirates des caraibes » et
travailler sur
deux jeux de roles.Le premier était l'univers de
« Polaris »
et le second était un univers de Dragons et de
Donjons.Lorsque
j'avais été remarqué par la B.D., il y
eut toute
une période de recherches graphiques de décors,
de
personnages, de véhicules.C'était une
période
assez longue.Moi, j'avais débuté ma
période
d'illustrateur mais j'allais pas etre payé tout de suite par
l'éditeur pour les planches.Pendant ce laps de temps, j'ai
fait des recherches pour trouver des petits boulots à
coté
et je suis tombé sur une annonce d'une boite
« Halloween
concept » qui cherchait des dessinateurs au
départ
pour faire de la presse ( illustrer des scénarios de Jeux de
Roles ou des pin ups comme dans
« Backstab » ou
« Le Lotus Noir ».) Ensuite on
m'a mis sur le
projet « des pirates des
caraibes » où
il fallait faire des petites cartes, c'était très
interressant.Ca m'a permis de m'occuper pendant un mois et de toucher
mes premiers revenus de dessinateur. J'en avais perçus avant
puisque pendant les études ,j'avais travaillé
pour une
boite de pub.Je leur ai fait un jeu de 7 familles sur les
métiers.
Cétait vraiment en touriste, parce que je savais que la BD
n'allait pas etre mon unique gain.
Passer des tuniques bleues aux
pirates des caraibes, quelles ont ét tes influences?
A onze-douze ans, c'était les
tuniques bleues. Treize, c'était en 85. Quand j'ai fais le
projet chez Delcourt, j'avais un style proche de Vatine. C'est avec
ce style que j'ai travaillé sur le projet des pirates des
caraibes.
Maintenant, quand je travaille sur un
sujet, je cherche dans mes livres, mes documentations, et je fonce
aussi sur mes dvd. Je chope toute une collection de films qui vont
m'apporter qq chose. J'ai regardé Pirates, de Roman
Polanski,
l'ille aux pirates de René Harlin. Et puis l'Ile aux
Trésor.
J'ai chopé des idées de costumes, d'armes
d'abordages
mais je m'en suis détaché très vite,
car il
fallait que je rende 140 dessins en couleurs en un mois. Je devais
donc aller à l'essentiel, mais ça m'a servi de
bases.
Qu'es ce qui d'après toi a
plus à Delcourt dans ton projet pour Golden City. Cette
ressemblance à Vatine?
Je pense qu'effectivement, il y avait
un style qui rentrait dans ce qu'ils recherchaient pour le label
« Série B ». Mais le
choix c'est surtout
fait sur le fait que j'étais un dessinateur polyvalent. Dans
le projet que je leur avait montré, ils ont vu que je savais
faire des personnages, des jolies filles, et de la
« feraille ».
La « feraille », c'est la
manière dont
on va dessiner un avion, un hélicoptère, une
voiture.
C'est créer un design complètement original sur
une
moto-quad par exemple, ou une structure d'usine.
J'avais certaines lacunes en mise en
scène et en cadrage, mais Olivier sentait qu'il y avait un
fond derrière. C'est avant tout sur ces deux atouts, les
personnages et la ferrailles, que j'ai été
choisi.
J'avais en 86 developpé une BD
sur la guerre du vietnam.C'était l'époque
où
sortait
« Platoon »,
« Full
metal jacket », la série N.A.M.H..Je
dessinais
beaucoup d'hélicoptères américains,
d'armes à
feu, d'uniformes. J'ai appris à dessiner cette ferraile
là.
Pour dessiner des hélicoptères, je me contentais
pas de
les regarder, j'achetais des livres avec ce qu'on appelle des
« écorchés »,
c'est à dire
carrément les plans. J'essayais de comprendre comment ils
fonctionnaient en perspective, je les faisais tourner dans ma tete,
pour les dessiner. Au début, ce n'était pas
très
bien dessiné, et puis de la main levée, j'ai
commencé
à prendre la règel pour dessiner certaines zones
et à
m'appliquer pour mettre du détail, comme par exemple des
grilles d'aération, des petites loupiotes etc. Maintenant,
je
peux créer une bagnole futuriste volante, et je saurais
mettre
suffisemment de détails pour qu'elle soit
réaliste et
crédible. C'est tout un apprentissage qui dure vingt ans,
mais
après on peut faire ce qu'on veut. Je continue à
me
tenir au courant des progrès techniques, des designs... Des
films comme Starwars m'apportent beaucoup. J'achète des
maquettes que je monte comme un petit garçon (sourire). Dans
ce métier, ce qui me plait, c'est que tous les jours
j'apprend
qq chose.Je nesuis pas là statique.D'un mois à
l'autre,
j'affine mon trait.D'albums en albums, j'améliore mon
dessin,
l'encrage ou la mise en scene.
Quel était Le premier projet
que tu ais fait avec un scénario bien construit?
C'était à 11 ans.C'était
une histoire de pirates.Je ne l'ai jamais fini.Il devait y avoir 4 ou
5 planches mais c'était structuré.Je
m'étais
inspiré d'une B.D. qui était publié
dans
« Spirou ».un hussard
habillé tout en
rouge avec un cheval, c'était très rigolo.J'avais
envie
de raconter une histoire plus que juste faire un dessin car meme si
celui-ci raconte quelque chose, je voulais passer le pas et raconter
quelque chose qui dure plus longtemps. Pour moi le dessin c'est un
moyen de communication.
Et ton premier projet chez un
éditeur?
C'était en 96. Juste avant que
je fasse mon armée. L'histoire était un peu du
genre de
« X-Files », avec le F.B.I.
J'avais lu des
livres de Robert Ludlum, qui a écrit « la
mémoire
dans la peau » et j'avais été
passioné
par son roman « le dossier
Chancelor ».J'avais
crée un héros du F.B.I. qui enquete sur une loge
maçonique.j'avais fait un premier projet que j'avais
proposé
aux éditions
« Delcourt » , mais je m'y
étais très mal pris. Je l'avais fait un peu au
hasard.
J'avais voulu faire quelque d'original, en montant les planches comme
une bande annonce de film. Ils m'avaient renvoyé le truc
avec
une lettre type, disant que mon projet « ne rentrait
pas
dans la ligne éditoriale ».
J'ai repris le projet en faisant
quelque chose de plus construit, avec des recherches de personnages,
de décors, acoompagnés d'une quinzaine de
planche. Je
m'étais amélioré en dessin. J'ai
envoyé
le dossier à Delcourt. Ce que j'ai compris, c'est qu'ils
avaient trouvé ça interessant, mais mon dossier
s'était
égaré lors de leur
déménagement. Je n'ai
donc jamais eu de réponse.
J'ai recommencé, en écrivant
une histoire qui se passait dans le futur, avec une ambiance un peu
aquatique, qui s'appellait
« Valentine ». C'est
une histoire que j'ai toujours dans mes cartons, que je ressortirai
à
un moment donné, beaucoup améliorée
car j'ai eu
de nouvelles idées depuis. Cette fois-ci je m'y suis mieux
pris, j'ai fais moins de planches, mais j'ai toujours essayé
qu'il soit le plus complet possible à la lecture (recherche
de
personnages, de décors, planches
dactylographiées).
J'avais fais sept planches en noir et blanc, une ou deux en couleurs,
pour que l'on voie toutes les étapes du boulot. L'histoire
n'était pas terrible, mais ce que je voulais
c'était
etre dessinateur. J'y suis allé au culot. Mon meilleur amis
m'a emmené à Paris et je suis
carrément allé
sonner à la porte de Delcourt. J'ai
déposé mon
dossier sur le bureau du responsable, qui était
François
Capuron. Il m'a dit que c'était plutot interessant, mais
qu'il
regarderait plus tard. Ça avait duré deux
minutes. Et
puis je suis repartis.
Ils m'on rapellé au bout de dix
jours, et c'est là que j'ai rencontré Olivier
Vatine.
Je ne pense pas que ça ai été une
question de
hasard, mais plutot d'opportunité. À
l'époque,
sur Golden City, plusieurs personnes travaillaient sur les
recherches, mais ils n'avaient toujours pas trouvé
quelqu'un.
Ils ont réessayé avec moi. Ils m'ont
demandé une
dizaine de dessins sur le synopsis de Golden. J'en ai fait une
centaine. Ils étaient ravis mais ils m'ont bien
expliqué
qu'il fallait encore quelques temps pour que ce soit
accepté.
J'étais prêt à tout pour y arriver.
L'histoire me
plaisait beaucoup.
Quelles ont été tes
impressions lorsque tu as rencontré Vatine, et que t'a-t-il
dit?
La première fois, je l'ai eu au
téléphone. J'étais
impressionné mais
ravis. Il m'a présenté le projet, puis on a
convenu
d'un rendez-vous chez Daniel Pecqueur, à Rouen. J'ai
rencontré
Daniel Pecqueur, Fred Blanchard et Olivier Vatine. On a
passé
un repas à discuter. La rencontre s'est très bien
déroulée et on m'a bien renseigné sur
le métier
de dessinateur. Lorsque j'ai rencontré Olivier, je
m'attendais
à voir Nao, mais il ne lui ressemblait pas du tout! (rires).
Comme quoi on a beaucoup d'a priori
avec les dessinateurs. On se les représente avec le physique
de leurs personnages... mais ça n'est pas du tout
ça!
Quelles ont été tes
recherches graphiques sur Golden City?
Olivier ou Fred Blanchard ne vous
disent pas comment dessiner, mais ils vous conseillent de regarder un
auteur en particulier. Au niveau disign, on m'a orienté vers
Sidmid, qui avait fait des recherches pour Blade Runner et des
bouquins sur des immeubles modernes. Ils m'ont emmenés sur
Paris, dans des boutiques de comics US, pour me faire
découvrir
du Mike Mignola. Après, il y a une part de
références
qui sont le fruit de nos acquis.
Quand j'étais minot, j'adorais
« l'autobus imperial »,
« le club
des cinq », « les petites
canailles ».
Par exemple, pour les enfants de Golden, je pense m'en etre
inspiré.
Pour moi, la cabane, c'est le lieu où habitaient les enfant
perdus de l'Ile Imaginaire.
Pour moi, la création, c'est
puiser dans les souvenirs de façon inconsciente le moment
venu. J'ai plutot tendance à profiter de ma culture
générale,
et à la mélanger à ce que je lis dans
les
revues. On est un peu « comme des
éponges »,
c'est ce que dit Vatine. A un moment donné, on prend tout ce
qui nous entoure, et on le ressort plus tard.
Quand j'ai besoin de dessiner un vélo,
je fonce à Décathlon, et je prend tous les
catalogues
sur les vélos. Pareil pour la plongée. Je pense
que
l'endroit où on trouve le plus d'infos, c'est dans les
magasins de presse.
Sinon, j'aime bien les dessins
animés. Par exemple, j'ai redécouvert
récemment
« Nadia et le secret de l'eau
bleue », que je
trouve magnifique. Je pense qu'inconsciemment, j'ai dessiné
le
personnage du petit génie de Golden en pensant à
celui
de Jean dans « Nadia ». J'ai mis
du Totoro dans
le tome 5 avec Mai. J'aime beaucoup les univers de Miyazaki. J'essaye
de comprendre comment il arrive à créer des
choses,
comme le château volant dans le château dans le
ciel. Je
ne veux pas copier mais comprendre quelle démarche il a eu
pour en arriver là. Je pourrais ainsi avoir la meme
démarche
pour créer quelque chose d'original. Faire quelque chose de
fanrtastique, cérédible, avec du banal, c'est
ça
la création.
Ce qui me plait, c'est de créer
un univers personnel. J'ai besoin de m'appropier les personnages.
T'a-t-on demandé d'éviter
de faire trop « Largo Winch »?
Le scénario en est assez
éloigné. C'est vrai que pour le premier album,
les
libraires l'on catalogué comme un Largo Winch aquatique.
Pour
etre honnete, j'étais fier car j'adore Largo Winch. Quand
j'ai
commencé le premier tome de Golden, la première
chose
que j'ai faite, c'est de ranger les album que j'adorais. Le premier
que j'ai enfouis – je ne l'ai quand meme pas
enterré dans le
jardin (rires) – c'était le
« Corail Noir »
de Vatine, parce que j'en suis fou. Les BD de Largo, aussi, et celles
de Marini. Ce sont des gens dont j'aimais beaucoup le travail.
Je pense que Banks et Largo sont
complètement différents. Il y a bien sur en
commun la
quete initiatique, comme pour Blueberry. Mais je sais que quand je
dessine, c'est différent.
Comment se passe ta collaboration
avec Pecqueur? Il te donne la trame entière, ou juste des
fragments?
Au début de l'album, il me parle
de l'aspect général de l'histoire.
Après, il
écrit, séquence par séquence, dans
l'ordre
chronologique et moi, je découvre au fur et à
mesure.
Je suis donc son premier lecteur. On est chacun dans notre partie
professionnelle. Il met en place tout le scénario, la mise
en
scène des planches. Moi j'apporte ma culture visuelle, pour
donner forme à ce qu'il écrit. Daniel est aussi
très
proche de mes envies. Pour lui, c'est important que le dessinateur
soit comblé.
Par exemple, dans le tome six, il y a
un combat de Kendo (sabre japonnais, ndlr), avec tout un
cérémonial
et des armures particuliaires. Je lui ai fais des propositions par
rapport à ce dont il vaiat besoin.
Il y avait aussi le passage où
on avait besoin d'une représentation de
l'université où
Brad avait passé quelques temps. Mon travail a
été
de trouver visuellement le décors de
l'université. IL
fallait un lieu un peu perdu, mais en meme temps en faire une
approche solenelle. J'ai simplement imaginé l'Angleterre
avec
la montée des eaux, où tout le pays
s'était
morcelé en petits ilots. J'ai donné aux batiments
une
architecture écossaise, des murs sombres rouges. J'ai
créé
un décors en faisant des falaises très
escarpées,
dont le dessus serait couvert de foret. Quand je crée un
décors, j'essaye toujours d'incorporer l'eau, car je pense
que
c'est une ligne conductrice de Golden City.
Quels sont tes personnages
préférés?
J'aime beaucoup les enfants. Mifa,
Kumiko.... J'aime beaucoup Mifa, qui était une jeune
adolescente dans le premier album, et qui devient une belle jeune
femme. J'aime aussi dessiner Solo. J'ai appris à dessiner
les
Blacks en lisant « Black face »
J'adorais la
façon dont Lambil plaçait ces masses de noir sur
le
visage. Je trouvais ça très beau.
Je m'éclate aussi avec le
pélican.
Tu serais tenté par
l'animation?
Participer pourquoi pas, mais il me
faudrait du temps. Je pense aussi avoir encore des choses à
apprendre, au niveau des illustrations. Pour ce qui est du
crayonné
et des recherches, je commence à avoir une bonne
méthode.
Pareil pour le dessin et l'encrage. Dans le dernier album, j'ai
beaucoup travaillé sur la valeur d'encrage, afin de laisser
plus de naturel au trait encré. Lorsqu'on encre, on a
l'impression de rigidifier le trait, ce qui rend le dessin plus
froid. Dans l'avenir, j'aimerais bien commencer à manipuler
le
travail par ordinateur. Sur les dessins d'ex-libris, je sais encrer
à
l'ordinateur. Je fais un crayonné poussé, que je
nettoie, puis je scanne le dessin en valeurs de gris et je fais un
encrage avec des outils de photoshop. C'est très
interessant.
Il y a un gain de rapidité : le travail est
divisé en
deux. En outre, on garde une certaine souplesse dans le trait. Je
voudrais maintenant coloriser par ordinateur.
Lanimation, oui, pourquoi pas, mais
c'est assez long. Pour l'instant je préfère faire
du
Golden City et développer l'univers. Je suis dans l'esprit
du
feuilleton.Je voudrais faire une quinzaine ou une vingtaine d'albums
sur Golden City. C'est vrai qu'on a terminé un premier
cycle,
mais on continue l'histoire avec les personnages. C'est une
série
ouverte.
Est-ce que tu aurais envie de
davantage intervenir dans le scénario?
Non, c'est vraiment le travail de
Daniel, et c'est quelque chose que je respecte beaucoup. On a un
échange entre nous, parce que chacun a sa propre culture.
Lui
a une culture d'histoire. Il lit beaucoup de romans. Moi, j'ai plutot
une culture visuelle. Ce qu'il me raconte m'inspire visuellement, et
des fois je lui raconte un décors, ce qui lui donne une
idée.
As-tu encore des difficultés
en dessin?
Oh oui, toujours. Par exemple, j'ai du
mal à dessiner des mains de tete. Je peux le faire dans
certaines conditions, c'est l'habitude, le coté
mécanique.
J'essaye de trouver des méthodes. Quand je sens que
ça
va etre difficile, je prend six ou sept clichés de mes
mains.
Pour certaines expressions du visage, c'est pareil.
En tant que lecteur, c'est vrai qu'on
va regarder avant tout dans les yeux d'un personnage, pour savoir ses
émotions et ses sentiments. Il y a aussi le corps, qui va
donner, par sa gestuelle, de nombreuses informations sur le
comportement. Je prend plein de photos, mais je ferme les volets,
pour éviter que mes voisins ne me prennent pour un fou!
Le principe de se photographier me
permet d'aller plus vite pour dessiner, c'est assez pratique.
Vas-tu faire vieillir les
personnages dans les prochains albums?
Non. Je ne suis pas partisant de ce
genre de choses. S'ils vieillissent, c'est que mon trait
évolue.
Mifa, c'est le seul personnage avec Banks qui ait un peu
changé...
Quel regard portes-tu sur tes album
précédents?
Je regarde de temps en temps le tome
un. J'ai une certaine nostalgie de l'époque, de ce que
j'arrivais à faire en détails. C'est vrai que
chaque
album représente une époque et une
évolution de
mon travail.
Je les prend comme ils sont. Quand je
repère une erreur, ce qui est plutot rare, j'accepte le
dessin
tel qu'il est. Parfois, je me demande pourquoi j'ai perdu telle
finission sur tel détail, mais mon trait s'est
modifié.
Mon plaisir, c'est quand je reprend un
ancien album pour chercher un personnage, et que je me surprend
à
le relire (rires). Ça me rassure.
En plus, vu que les albums marchent
bien, maintenant, je peux prendre davantage mon temps. Pendant quatre
ans, j'ai du travailler vite et bien. Maintenant, je prend mon temps
quand j'en ai besoin... sur un décors par exemple.
Quand je regarde le tome un, je suis
épaté de voir que, pour certaines choses, j'ai
mis plus
de détails que mintenant, alors que je travaille plus vite.
J'aimerais pouvoir travailler aussi
vite et aussi bien que pour le premier album, avec le style
d'aujourd'hui. Mais bon, je suis heureux de chaque album.
Tu passes combien de temps sur une
planche en moyenne?
C'est selon la difficulté... Si
il y des décors de grande ampleur, ça me demande
beaucoup plus de travail, surtout en encrage. Je peux passer cinq
jours comme deux semaine sur la meme planche. C'est très
rare
que j'en fasse une en trois jours. Ça a du m'arriver sur le
tome trois, où j'ai meme, vers la fin, du en faire en deux
jours. E regle générale, sept à huit
jours en
moyenne.
La partie « Board »
va prendre ue demi journée, voire une journée.
Ensuite,
il y a le dessin et l'encrage.
Le sixième tome marque la fin
d'un cycle. Par la suite, ce seront des one-shot, ou d'autres cycles?
Là, on va aprtir sur un autre
cycle, mais de deux-trois albums. Après, pourquoi pas des
one-shot? On a pas mal de choses à raconter...
Certaines séries comme Largo
Winch prennent le parti de faire des histoires en deux albums. Nous,
on veut rester ouverts sur l'histoire. Si on a besoin de
développer
une partie suplémentaire parce qu'elle plait au public, on
veut avoir la liberté de le faire. On peut très
bien
s'engager pour une histoire en deux tomes, et puis se rendre compte
qu'il en faut un troisième ou un quatrième. On
veut
garder cette liberté. Je pense qu'il faut etre à
l'écoute du public. Certains personnages comme les enfants,
sont devenus récurents. Et puis au tome deux, Amber est un
personnage qui a énormément plu.
Peut etre des spin-off? Sur le passé
d'Amber par exemple?
Oui, Daniel y a déjà
réfléchis. Il ne m'en a pas encore
précisément
parlé, mais cela serait interessant de développer
un
album sur elle. Je pense qu'il faut attendre encore dx ou trois cycle
avant de s'y atteler.
Un projet d'atlas, aussi?
Il y a un projet de hors série.
On aimerait faire découvrir la cité, pour donner
une
réalité l'ensemble, parce que pour l'instant,
Golden
City, c'est un laboratoire secret, le bureau du président,
un
aéroport et le centre ville. Il reste beaucoup de zones
à
découvrir. L'idée est de montrer comment vit la
cité.
D'où elle puise son énergie, la
manière dont les
gens vivent, dont la cité se déplace. C'est ce
qu'on va
développer dans les deux prochaines années. Il y
aura
de petites encyclopédies, sur les uniformes, des photos, des
dessins....
Sur le principe de la « Clé
des Confins » de Bourgeon?
Oui, à peu près sur ce
principe là. On veut le faire de manière assez
ludique,
à travers une histoire avec les enfants.
Tu as des projets autres que Golden
City?
Pour le moment, je suis très
centré sur Golden City. J'ai eu deux envies
l'année
dernière. L'une de reprendre la série que j'avais
commencé avant Golden City, par ce que j'avais
développé
un autre idée originale. Ça aurait fait une autre
histoire en deux tomes. Et j'ai aussi eu envie d'etre illustrateur de
livres pour enfants.
J'ai eu un contact avec un éditeur,
mais rien n'est fait. C'est juste une envie pour l'instant.
Si tu étais un perso de BD?
La part la plus mégalomane de ma
personne dirait « Tintin ». Je
suis comme
idéfix, je n'aime pas qu'on détruise les arbres.
J'aime
bien la nature. La foret, la mer...
Plus sérieusement, un des deux
tuniques bleues. Celui qui est sérieux.
J'aime bien Papyrus aussi.
Cette passion pour la nature rejoint
celle d'une de tes idoles, Miyazaki.
Oui, c'est vrai.
Dans le royaume des chats, il explique
à un dessinateur comment représenter la Nature.
Le fait
que tout était le fruit du hasard. Dans un feuillage, il
faut
casser les formes. On ne doit rien reconnaître. Il faut que
ça
vive.
C'est le culte Shinto : savoir
respecter les autres et où l'on vit.
Et dans les productions actuelles,
quelles sont les séries que tu retiens?
Je me suis ouvert à pas mal de
séries. Le manga, notamment. J'ai découvert
Katsura
avec Y's, D.N.A....
Ensuite, il y a eu Gantz, Planete, et
Monster. Après, je me suis arrétté
parce qu'il y
en avait trop.
Ensuite, chez les américains,
j'aime particulierement des illustrateurs comme Adam Hugues, Travis
Charrest, qui ont vraiment deux styles opposé, mais
superbes.
Il y a aussi Campbell. J'ai adoré
Danger Girls. Toute la série est bourrée
d'humour, et
très jolie. J'aime aussi Chiodo. En BD, j'aime beaucoup
Mignola meme si je ne m'y réfère pas.
En Europe, il y a Marini. Je suis
épaté, il fait tous les genres. Il y a des
séries
que je suis tout le temps, comme Largo Winch, Soda, Kogeratsu-san. Je
lis aussi l'Effaceur, les Gendarmes... Il y a plein de
séries
que je découvre. J'aime beaucoup Frezzato.
Je regarde beaucoup les Art Book de
Miyazaki, Masamune Shirow. Je suis fan absolu, en illustration, de
Orange Musata. J'aime beaucoup « Blue Submarine
6. »
Avec tout ce qui sort, on n'a pas le
temps de tout lire!
Maintenant, la question que tous les
fans se posent : quel gel utilise Banks pour faire si bien tenir sa
mèche en S?
Brad a un gel spécial, car elle
n'est pas naturelle chez lui (sourire). Mais celle de Banks est
totallement naturelle. C'est le symbole de pharaon qui lui est
resté
de ses anciennes vies (rire).
On a mis beaucoup de temps à
trouver ce personnage. Lui faire une belle gueule. Faire des
méchants, c'est pas compliqué. Moi j'adore, mais
faire
une belle gueule, c'est pas évident. Et faire quelque chose
qui le particularise, encore moins.
Il est passé par énormément
d'étapes, puis, à un moment donné,
j'étais
en trian de lire un Travis Charest, qui a fait une BD sur les
W.I.L.D.C.A.T.S. Dedans, il y a un personnage, je crois que c'est
Griffin, qui a un masque rouge sur le figure. Il avait une masse de
cheveux qui partaient en mèches dans le vent. J'ai
essayé,
et puis ça a marché.
Elle évolue au cours des albums.
Des fois elle est courte, d'autres fois longue, je la dessine un peu
au feeling. Peut-etre qu'on aura un jour une pub pour
l'Oréal,
pour un gel à fixation ultra-rapide! (rires)
Merci pour ta gentilesse, et
rendez-vous au prochain album.