Alberto Varanda
interview réalisée en 2006
Bibliographie:
- La 22 millième dimension
- Bloodline
- Elixirs
- La Geste des Chevaliers Dragons
- Paradis perdu
- Reflets d'écume
Quand tu étais enfant, quel
métier voulais-tu faire?
Quand j'étais petit, j'ai
toujours voulu dessiner, pas forcément faire de la BD, mais
du
dessin.
Tu es monté dans le nord de
Paris à l'age de trois ans. Comment t'es venue
l'idée
de faire de la sculpture sur bois?
Je ne regrette pas la formation, cela
m'a permis d'avoir une vision en 3D de mes dessins. Pourquoi la
sculpture? parce que pour mes parents, le dessin, c'était
flippant. Ils voyaient où pouvait mener la sculpture, mais
pas
le dessin. Leur dire que la sculpture était un
métier
les a rassurés. Avec l'aval de mon prof de dessin, qui m'a
encouragé, j'ai pu me diriger vers le dessin. Il faut dire
qu'avant, on ne m'encourageait pas beaucoup à suivre cette
voie.
Comment as-tu découvert la
BD?
Médicalement, tous les
mercredis, j'étais cloué au lit. Des amis
m'amenaient
des BD. J'ai commencé avec Astérix. J'ai lu tous
les
albums.
Qu'est ce qui t'a donné
l'envie de faire du dessin?
Du dessin? C'était sûrement
de la thérapie. Je ne me suis pas dit, un jour,
« je
ferai du dessin ». C'était là
dès le
départ (il montre sa tête). Je me souviens de mes
parents me cherchant partout dans la maison, parce qu'il n'y avait
pas de bruit. J'étais par terre en train de griffonner. On
m'a
toujours connu un crayon à la main. Je pense que c'est
maladif.
Après la sculpture sur bois,
comment se sont déroulées tes études?
A Paris pour les Beaux-Arts, mais pas
longtemps. Ça ne me parlait pas. C'était
peut-être
trop libre. Il me fallait un cadre. Si je n'en ai pas, je crois que
je fais n'importe quoi. La pub et l'illustration me parlaient plus.
C'est plus proche de la BD que je fais aujourd'hui, comparé
avec la peinture que j'ai dû apprendre aux Beaux Arts.
Qu'est ce qui t'a conduit de la pub
à la BD?
C'est le hasard d'une rencontre, comme
souvent. Pendant mes études, j'ai assisté une
décoratrice qui travaillait chez Fauche. J'en ai
profité
pour montrer un book avec plein de croquis. Ça
n'était
pas de la BD, juste des dessins. Comme il y avait plein de dessins
humoristiques, Jean Léturgie et Fauche m'ont
proposé de
crayonner du Rantanplan pour la presse.
J'ai donc terminé mes études
en crayonnant Rantanplan. Janvier encrait, et Morris signait.
As-tu travaillé sur le film
« Lucky Luke »?
J'ai fais des modèles sheet sur
bleu. Ce sont les personnages que l'on présente, et qui
servent de modèle aux animateurs. Ensuite, on dessine le
même
personnage dans plein de positions et de vues différentes.
C'est très laborieux, ça ne m'a absolument pas
plu. Je
l'ai fait parce que je voulais toucher au milieu de l'animation, mais
je n'en garde pas un bon souvenir.
Si je devais en refaire, le story-board
ou la création des personnages m'intéresseraient
davantage.
Comment s'est passée ta
rencontre avec Franquin?
Cette rencontre a eu lieu grâce à
Jean Léturgie qui travaillait sur les scénarios
des
Tifous, avec Delporte. C'était l'adaptation de la DB en
dessin
animé pour FR3. Je devais dessiner les petits personnages
à
la façon de Franquin, pour d'éventuels produits
dérivés. J'en ai fait des tonnes chez moi, mais
il
fallait les montrer au maître.
Jean avait rendez-vous, avec Delporte
et d'autres, à Bruxelles, chez Franquin. Il m'a
proposé
de m'emmener. C'était génial de voir Dieu en
personne.
C'était quelqu'un d'une très grande gentillesse.
Il m'a
reçu à bras ouverts, et m'a montré son
atelier
au sous-sol. C'était la caverne d'Ali-baba. Il y avait des
dessins au fusain géants de Mademoiselle Jeanne.
Cette rencontre t'as-t-elle confirmé
dans ta voie?
Franquin m'a convaincu de l'exigence
qui était nécessaire dans ce métier.
Voici une
anecdote : il griffonnait des vaches pour un arrière plan
dans
Gaston Lagaffe. Il dessinait le museau de l'animal : pendant des
heures s'il le fallait, il travaillait sur ce mufle, dessinant,
griffonant par dessus, jusqu'à ce qu'on ait l'impression que
ça suinte, que l'on sente l'humidité du museau.
Il
était déjà reconnu, il avait
déjà
plein d'albums derrière lui et cette exigence pour un
arrière
plan me sidérait. Je me disais que si lui avait cette
exigence, moi qui était un « jeune
branleur »
(rire), il me faudrait faire preuve de la même
volonté.
Ça a été un déclic
: la révélation de la
nécessité d'une
exigence absolue dans mon travail.
Et ensuite?
A ce moment là, je savais ce que
je voulais faire. Quand j'ai rencontré Jean, mon parrain
dans
la BD, il m'a proposé de faire un album chez Alpen
Publisher.
C'est lui qui m'a poussé et soutenu. L'album a
été
réalisé, mais n'a pas été
publié
car Alpen a licencié beaucoup d'auteur à cette
époque.
Au moins, j'avais un album fini; c'est Jean qui m'a motivé
à
continué.
Tu as aussi rencontré Morris?
Je l'ai croisé par hasard. Par
contre, je connaissais Janvier, l'encreur.
Et comment as-tu rencontré
Wasterlain?
Quand j'étais jeune, Fournier et
Wasterlain ont vu des planches que j'avais
réalisées,
dans le cadre de la communication pour air-inter,
présentées
dans une expo. Il m'ont dit que je devrais travailler chez Spirou.
Wasterlain m'a dit qu'ils allaient en parler à la
rédaction
dès le lendemain, et que je pourrais appeler Spirou de leur
part.
Quand j'ai appellé le directeur
de Spirou en Belgique, il m'a dit « Oui, on m'a
parlé
de toi, envoie moi ce que tu fais. »
Quelques semaines plus tard, on m'a
proposé de dessiner quelques planches pour le sommaire, avec
Gilson comme scénariste.
Pendant plusieurs semaines, c'est ce
que j'ai fait, avec en plus quelques illustrations
intérieures.
J'étais ravi de travailler chez Spirou, mais quand on m'a
demandé de faire des projets plus conséquents,
j'ai
été un peu dépassé. Je ne
connaissais pas
de scénariste, à part Jean qui était
déjà
très occupé. Je n'ai donc pas pu donner suite
à
la demande de la rédaction.
Ensuite, j'ai fais beaucoup
d'illustrations pour les jeux de rôle, ce qui m'a conduit
à
mettre la BD de côté.
Quel bilan as-tu tiré de
cette période?
Ça m'a rapporté un
minimum d'expérience. J'ai compris que ce n'était
pas
si simple que cela, qu'il y a beaucoup d'échec. On n'y
arrive
que si on ne se décourage pas. Il y a
énormément
d'occasions de se démotiver, de faire autre chose. Certains
jours, je n'avais qu'une envie, c'était de refaire de la
pub.
Au moins, j'aurais un salaire, et j'arrêterais de
m'angoisser.
Et puis finalement, non, le métier que j'aime, c'est la BD.
Il faut insister sans relâche,
c'est ce que j'ai appris. J'aimais bien aussi la vie que je menais.
Les gags pour Rantanplan m'ont permis de louer un petit studio en
plein Paris, à Bastille. Pendant un temps, j'ai
mené la
vie de bohème. Ce n'était pas évident
au
quotidien, mais avec le recul, cela reste de bons souvenirs.
Ça t'a appris le respect du
public?
Je ne sais pas, mais le respect du
travail, oui. Ensuite, lorsque l'on a le respect de son travail, on a
indirectement le respect du public. A partir du moment où
l'on
fait son maximum, on n'a rien à se reprocher, que le public
soit là ou pas.
Tu as travaillé chez Tintin
Reporter. Qu'y faisais-tu exactement?
C'était une revue exclusivement
française, je crois, un genre de magazine pour enfant. Ils
faisaient beaucoup de reportages photo sur le monde, la
planète,
c'était très écolo. On me demandait de
décortiquer une info pour l'illustrer en une page. Quand je
voyais un sujet aux infos, je proposais l'idée, puis on me
laissait carte blanche.
Par exemple, dans le numéro
spécial Hergé « Dessine moi
une fusée »,
on devait faire une BD d'une planche, ou une illustration. J'ai vu
des dessins de gens que je connais aujourd'hui, comme Mourrier.
J'avais, grâce à la pub,
la capacité de m'adapter à différents
styles
graphiques. On me demandait de bosser tantôt comme
Hergé,
tantôt comme Jacob. Un défi rigolo, mais pas super
excitant à la longue.
Comment es-tu passé de la BD
au jeu de rôle?
Je ne faisais pas de la BD à
proprement parlé, juste de la publication : il n'y avait pas
d'album en vue, et pas beaucoup d'argent. Il fallait bosser ailleurs
aussi.
Grâce à l'illustratrice
dont j'ai parlé plus haut, j'ai donné des cours
de BD.
Ça m'a toujours étonné de pouvoir
donner des
cours de BD en n'en faisant pas moi-même... Là, un
de
mes élèves - un adulte, faisant du jeu de
rôle –
m'a présenté aux futurs créateurs du
jeu « In
Nomine » et la boîte Siroz..
Ils cherchaient un illustrateur pour la
création d'un JDR français et d'une
boîte. Le
fantastique, ça me parlait un peu : j'avais fait pas mal
d'illustrations dans mon coin. J'ai eu un rendez-vous à
Versailles, chez Croc, le créateur du jeu, et son
équipe.
J'étais un peu impressionné. Je leur ai
montré
des dessins qui étaient plus
« pros »
que ce qui se faisait dans le monde du JDR à
l'époque.
Ça leur a plu.
C'était très mal payé,
mais par contre il y a avait pratiquement une extension par mois.
J'ai bossé pendant six ans non stop.
J'avais beaucoup de travail, ça
me plaisait, mais j'ai fini par me lasser. Je me rendais compte que
je tournais en rond.
Comment es-tu revenu à la BD?
J'ai fais un bilan : au bout de six
ans, je ne gagnais toujours pas mieux ma vie, et je ne faisais
toujours pas de BD. Heureusement, beaucoup de personnes
écrivaient
des nouvelles et des scénarios pour ce jeu. J'ai
rencontré
Gérard et Anne, qui depuis sont devenus Ange. Eux, ils
avaient
fait de la BD auparavant : « les crocs
d'ébène ».
Comme ça n'avait pas marché, ils
étaient eux
aussi un peu revenus de la BD.
C'est Croc qui nous a mis en contact,
car ils recherchaient des dessinateurs pour différents
projets. Ils m'ont proposé « Reflet
d'Écume. »
Au départ, ils m'avaient proposé autre chose, qui
ne
m'avait pas convaincu. En plus, j'avais un peu peur de me lancer dans
la BD, d'abandonner le JDR.
Du coup, mon dessin pour le premier
projet était un peu mou. Vent d'Ouest l'a jugé
très
mauvais. Je pense que ça m'a vexé. Comme je
n'avais pas
donné le meilleur de moi même, ils m'ont
donné
d'autres planches à faire. J'ai
réalisé une
planche très grande en couleurs directe, un travail de fou.
Ils l'ont montré à Vent d'Ouest, puis ils ont
signé
le contrat.
Le premier album est paru sans
prépublication. Je l'ai fait en couleurs directes, assez
proche de l'illustration, entre le jeu de rôle et la BD
à
venir. Je pense que c'était une bonne parenthèse.
Ça t'a mis le pied à
l'étrier?
Oui, ça a été mon
premier album. Comme pour tout premier album, j'étais
convaincu que c'était le meilleur album du marché
: le
plus joli, le mieux écrit, le mieux dessiné, et
qu'il
allait forcément se vendre beaucoup, que j'allais
être
riche et célèbre.
En fait, ce n'était pas du tout
ça. Ce n'était pas le meilleur album, le dessin
n'était
pas forcément top, le scénario était
un peu
compliqué et il ne s'est pas vendu. Je ne suis pas riche, et
pas célèbre non plus (sourire), mais
c'était un
premier album et on a embrayé sur le second. On redescend
vite
sur terre. En tous cas, il y avait la motivation.
On avait signé pour cinq album,
mais l'éditeur nous a arrêté la
série au
second. Nous étions un peu tristes.
Ensuite, vous avez embrayé
sur Blood Line...
Oui. Entre temps, j'avais fait un album
en noir et blanc, avec un centre social, avec les habitants du
quartier. Je revenais au graphisme, sans couleurs directes. Je
l'avais fait pour partager une expérience de vie avec des
gens. Mon directeur de collection de l'époque, chez Vent
d'Ouest, est tombé par hasard sur ce bouquin, et m'a
proposé
de laisser tomber la couleur directe pour faire du graphisme
à
l'américaine.
Ange pensait justement à une ré
exploitation des
« Héritiers », qu'ils
appelleraient « Blood Line »,
avec des
graphismes en noir et blanc, pour la collection
« Global »
chez Vent d'Ouest. Ils cherchaient un dessinateur. Quand les
directeurs de collection ont vu ce projet, ils me l'ont
proposé.
Un polar à l'américaine,
un graphisme « comics », je ne
savais pas si
j'en serais capable. Nous sommes partis sur une histoire de 136
planches.
L'album n'a pas forcément
marché, mais pour la première fois la critique et
le
regard des professionnels ont été bons. Nous
commencions à exister dans le milieu de la BD.
Du semi-réalisme de Reflet
d'écume, tu es passé au style
« Comics »
pour Blood Line.
Sur Blood Line, cela correspondait à
la recherche d'un style graphique. Tous les poncifs y sont
passés...
Enfin, tous les dessinateurs américains que j'aime bien,
ainsi
que certains français, comme Vatine, et d'autres.
Très vite, pourtant, je me suis
démarqué. Je ne voulais pas
« dessiner
comme ».
Par la suite, chacun fait en fonction
de son vécu et de sa sensibilité. On ne dessine
donc
jamais tout à fait comme quelqu'un d'autre.
Petit à petit, mon trait, tout
en restant ancré dans le comics, s'est
épuré de
plus en plus. Dans Paradis Perdu, je pense que je suis
arrivé
à un graphisme réaliste. En tous cas, il me
correspond.
C'est entre le comics et le franco-belge. Entre la ligne claire et le
clair-obscur.
Blood Line a été prévu
en combien d'album au départ?
En deux volumes de 130 à 140
pages, soit l'équivalent de sept ou huit albums
franco-belges.
La collection « Global » n'a pas
fonctionné,
et l'éditeur a décidé de ne publier
que trois
albums en format franco-belge. Les albums ont été
colorisés, parce qu'apparemment, le noir et blanc ne
plaisait
pas au grand public. Ensuite, il y a eu des complications, des
fâcheries, et l'album n'a pas marché.
Il a été mis en stand-by,
malgré son potentiel et l'éditeur nous a
proposé
autre chose.
Nous avons pris ça comme un
défi, et comme un jeu. On s'est dit « On
va faire
un bouquin qui marche ».
Les dragons, ça plait. Le titre
fut « La Geste des Chevaliers
Dragon ». Il y
aurait des jeunes filles un peu dénudées, avec
des
armures qui ne servent à rien. On a
décidé de
prendre tous les poncifs du genre, par jeu, mais avec une histoire
crédible, pour ne pas faire n'importe quoi.
Ça a marché.
J'étais un peu triste, parce que
cet album a été écrit pour
être vendu, et
il a été vendu. Pour Blood Line, nous n'avions
pensé
à rien sinon au plaisir d'écrire, et j'aurais
aimé
qu'il trouve son public.
Est ce que tu aurais aimé
reprendre Blood Line pour l'achever?
Normalement, ça ne devait pas se
terminer comme ça. Il y a eu un quatrième tome,
dessiné
par quelqu'un d'autre. Il devait continuer la série, mais il
y
a peut-être eu d'autres fâcheries.
Moi, je n'étais déjà
plus chez Vent d'Ouest à l'époque, car,
à la fin
de la Geste, j'ai été contacté par un
autre
éditeur.
Pourquoi n'as-tu illustré
qu'un album de la Geste?
Je n'avais pas envie de faire de suite
à la Geste. Avec Ange, on avait prévu un concept
à
l'américaine: toujours le même
scénariste, mais
un dessinateur, et donc un graphisme, différent à
chaque fois.
Vent d'Ouest a refusé le
concept. Ils voulaient que ce soit moi qui dessine.
De mon côté, j'avais
décidé que je ne ferais qu'un seul album avec des
dragons, et pas deux. Je n'ai plus travaillé pour eux.
Ensuite, j'ai eu l'opportunité
de développer un autre projet chez Soleil, chez qui je suis
toujours.
Le concept de la Geste a depuis été
repris chez Soleil, et ça fonctionne très bien.
Qu'est ce qui t'intéresses
dans l'héroïc fantasy?
Je préfère
une épée à un flingue car j'ai du mal
à
dessiner un pistolet. Je n'ai pas la culture des armes. Buchet par
exemple, aime les armes et la SF, c'est son truc.
La fantasy, c'est
les entrelacs, les drapés, les enluminures que j'aime. Pour
le
deuxième tome d'Élixirs, j'ai dessiné
un
laboratoire, et là tout y est passé. Le costume
de Dark
Crystal pour la bestiole, des fioles, des blasons, des poudres, des
parchemins...
Pour moi, la
fantasy, c'est tout ce qui est ornemental.
Quelles sont tes références?
Je ne m'inspire
pas réellement de quelque chose de précis.
On se constitue
tous une sorte de bibliothèque dans notre inconscient. Quand
on voit un film, qu'on lit un roman, on retient certains
éléments,
un cadrage, une armure... qui nous servent ensuite de point de
départ.
C'est ça,
la création : piocher à gauche et à
droite...
Les dessinateurs qui t'ont succédé
à la Geste semblent avoir fait un effort pour conserver ton
style.
Au départ, c'était pour
garder une certaine cohérence. Maintenant, il n'a pas
été
exigé qu'ils respectent mon travail.
Tu as reçu des prix pour la
Geste en 99.
En effet. Pour chaque album, il y en a
eu, sauf pour Blood Line, paradoxalement.
Comment en es-tu venu à
dessiner pour des collectifs comme
« Dinosaures »
chez le téméraire?
C'était une boîte qui
faisait des récits historiques sur les villes du Nord. Ils
voulaient se lancer dans la « vraie
BD », et
ils ont commencé avec ça. Il y avait Crisse en
couverture, pour attirer le lecteur. Je ne sais pas pourquoi on m'a
contacté... Peut-être que Crisse a
donné mon nom.
Quoi qu'il en soit, beaucoup de gens
ont travaillé chez le Téméraire. Quand
la boîte
a fait faillite, tout le monde est repartit, soit chez Soleil, soit
chez Vent d'Ouest.
Quelles ont été tes
impressions en rencontrant Crisse?
La première fois que j'ai vu ce
qu'il dessinait, dans une grande surface, je ne savais pas qui
c'était, car je n'avais aucune culture
« BD ».
Il faut dire que je ne savais même pas qu'il existait des
librairies spécialisées...
Les dessins de Crisse, je les trouvais
mignons, jolis. Après, dans un cour de BD, j'ai vu beaucoup
de
gamins avec l'épée de Cristal, mais je ne savais
toujours pas qui était Crisse.
Ensuite, je l'ai rencontré pour
les dix ans de Vent d'Ouest, à Bordeaux. J'avais
déjà
fait Blood Line, ou alors c'était en
prépublication
dans Gotham. Il m'a complimenté sur mon travail.
J'étais
flatté, car si je connaissais don oeuvre, je ne connaissais
pas le bonhomme. Il donnait aussi des cours de BD, et donnait Blood
Line en exemple à ses jeunes dessinateurs.
C'était la première fois
que je rencontrait un professionnel qui me faisait des compliments,
et qui était si gentil.
Crisse nous a dit qu'il était
autodidacte. Toi, tu as pris des cours?
De BD, non, je suis autodidacte.
L'anatomie, tu l'as apprise tout
seul?
Non, ça je l'ai appris à
l'école. Je la maîtrisait un peu, mais ce
n'était
pas mon fort. J'ai appris aussi que Bernie Wrightson n'en a jamais
fait, ce qui est un peu bluffant, quand on voit son Frankenstein, par
exemple.
Pour ma part, j'ai appris l'anatomie en
faisant des croquis de nus.
Comment s'est passée ton
arrivée chez Soleil?
Ce sont eux qui m'ont contacté.
J'ai trouvé que leur catalogue s'était bien
étoffé
depuis dix ans. Il y avait Froideval et Ledroit (Shaa), Crisse...
J'ai eu envie de bosser pour eux et
maintenant j'en suis toujours content.
Tu es venu avec Ange chez Soleil?
Oui, c'était une des conditions
: qu'ils écrivent les scénarios de mes futures
séries.
Après les deux tomes de
Paradis Perdu, tu as changé de scénariste et tu
travailles avec Arleston sur Elixir. Comment ça s'est
décidé?
On s'est rencontrés par hasard
au festival de Solies. Je devais dessiner la Geste m'a
croisé
en disant « J'aime bien ce que tu
fais. »
Personnellement, n'ayant jamais lu
Lanfeust, je ne pouvais lui retourner le compliment. Il a dit
« Peut-être qu'un jour nous travaillerons
ensemble », comme une boutade.
Entre temps, j'ai fait Paradis Perdu.
On s'est recroisé dans un autre
salon, et il a de nouveau évoqué une
collaboration. Sur
le fond j'étais d'accord, mais sur une histoire plus
légère
que Paradis Perdu, pour lequel je me suis
énormément
investit.
Il a acquiescé. Ce serait une
expérience, quelque chose pour se faire plaisir, une
série
de gags, ou de récits courts. De fil en aiguille, l'histoire
s'est étoffée, et on s'est rendu compte qu'on
était
partis pour un album, ce qui faisait plaisir à
l'éditeur.
J'ai commencé à mener
deux albums de front : Paradis Perdu 2 et Elixir 1. On s'est rendu
compte que j'allais pénaliser tout le monde, car le
délai
de parution allait être beaucoup trop long, pour le
scénariste
comme pour le lecteur. C'était ingérable.
Un jour, au cours d'une réunion
avec le Directeur de publication et l'éditeur, il a
été
décidé de confier Paradis Perdu à un
autre
dessinateur, ce qui permettrait d'avoir des délais de
publication raisonnables.
As-tu des regrets?
J'aurais bien aimé continuer
Paradis Perdu, car je m'y étais beaucoup investit. Je me
sentais proche des personnages, de l'univers graphique et du visuel.
L'ambiance sombre, le cuir les chaînes, l'Enfer et le
Paradis,
ça rapellait « In
Nomine ». C'était
vraiment mon univers fantasmagorique. J'aurais bien mené les
deux de front... Ou plutôt, avancé Elixir
rapidement, et
de temps en temps réalisé un Paradis Perdu, comme
une
pierre qu'on pose à chaque fois.
Mais ce n'était pas gérable
pour les gens autour de moi.
Évidemment, je pense que Xavier
fait du bon boulot, mais je ne feuillette pas les albums. Je
préfère
oublier.
Est-ce différent de
travailler avec Ange par rapport à Arleston?
Les méthodes
de travail sont différentes, oui. Le rendu de ce que livre
Ange est plus littéraire, il y a davantage de texte et moins
de découpage. Je suis libre du découpage et de la
mise
en scène. Je peux ajouter ou supprimer des cases.
Avec Arleston, on
a pris le pari de bosser pour le grand public. Les planches sont
très
classiques, linéaires, en quatre bandes. Cela apporte une
lisibilité que je n'avais pas forcément dans
Paradis
Perdu. Si le lecteur de comics s'y retrouvait, le lecteur de BD
franco belge pouvait être un peu largué.
Arleston a
commencé en dessinant, donc il a quelques notions. Il sait
ce
qu'il peut intégrer en une case. Il me prépare un
pré-découpage, avec l'emplacement des cases.
Je me surprend :
d'une part, je suis obligé de dessiner dans un
carré,
sans adapter la case aux personnages et d'autre part, je dois trouver
le cadrage le plus pertinent pour rentrer une scène dans un
cadre précis. C'est un bon exercice. Ensuite, je me rend
compte que tout coule de source. Il est rare que j'ajoute quelque
chose. Je prend son découpage, je le décalque et
je
dessine dedans.
Et en ce qui concerne le design des
personnages?
Dans les deux cas,
bien sûr, je respecte leur description, mais en
général,
ils me donnent surtout une description psychologique, qui va
déterminer leur physionomie.
Pour les costumes,
soit j'en ai une idée visuelle évidente, que je
propose
– en général, ça convient
– soit je n'en ai
pas, et je suis obligé de leur demander des
éclaircissements.
Gabriel, de
Paradis Perdu, ne devait pas être habillé de cuir
au
départ. Comme je venais de voir
« Édouard
aux mains d'Argent », qui correspondait parfaitement
à
l'image que je me faisait d'un ange, Gabriel, pour moi, devait
être
en cuir.
Au départ,
Ange et moi n'étions pas d'accord... On a
insisté, on
s'est battus, et finalement, il est tout à fait identifiable
en cuir, Gabriel.
Pour Tolric, le
héros d'Élixirs, il fallait coller à
sa
personnalité, un peu déconneur, un peu branleur,
voyageur, qui manie mieux la langue que la lame. J'avais
pensé
à Sinbad, je le voyais brun, avec une barbiche, venant
d'Orient. J'ai proposé tout cela à Arleston, et
il a
accepté.
Pour la princesse,
par contre, il n'avait pas du tout d'idée, il avait juste
brossé son caractère. Je l'ai faite petite, un
peu
boulotte, avec les cheveux bouclés, mais elle ressemblait un
peu trop à Pélisse de la Quête de
l'Oiseau du
Temps. Pour m'en éloigner, j'ai pensé
à la faire
asiatique. Dans la version finale, elle n'est plus du tout asiatique,
mais cela m'a permis de trouver une coupe de cheveux
particulière,
des fringues originales etc... On ne m'a rien imposé.
Le héros d'Élixirs a
un petit côté Han Solo (le gilet)?
Oui, mais c'est
totalement involontaire. Inconsciemment, on est influencés
par
ce qu'on aime.
Par exemple, je
structure généralement mes couvertures en
triangle,
comme Frazetta. J'apprécie beaucoup ce qu'il fait, alors je
mets une nana, un mec... Quand on regarde les couvertures de Paradis
Perdu, on retrouve ce style de composition. Je me force parfois
à
changer, mais je trouve que c'est une composition parfaite, alors...
(sourire)
Ton graphisme a bien changé
entre Paradis Perdu et Élixirs...
Je n'ai pas
forcément changé de graphisme, mais j'ai
changé
de sujet. Or, pour un sujet comme Élixirs, une anatomie
réaliste ne convenait pas... Il y a beaucoup d'humour, donc
j'ai opté pour un style semi-réaliste.
Le début de
l'album a été un peu laborieux parce que j'avais
du mal
à déterminer mon trait. Le héros
passait d'un
graphisme assez réaliste à plus du tout
réaliste,
ça ne me convenait pas. Petit à petit, je suis
arrivé
à trouver un bon équilibre, avec le
semi-réalisme.
Il y a une
exigence anatomique – je ne fais pas de bras caoutchouc, les
personnages ont une morphologie correcte, mais je peux me permettre
certaines exagérations, des grimaces, que je ne pouvais pas
faire dans Paradis Perdu. Ça c'est plutôt un
plaisir.
Les femmes sont plutôt...
rondes (rire). La
garde du corps ne devait pas l'être autant. Dans le tome 2,
elle revient un peu à une stature semblable à
celle des
héroïnes de la Geste, c'est à dire
correspondant
au stéréotype de garde du corps.
Par contre, la
princesse me va très bien. Ceux qui la trouvent trop ronde,
tant pis, car en ce qui me concerne, elle correspond parfaitement
à
ce que j'avais en tête.
Il paraît
juste que je leur fais des cuisses un peu fortes. Dans
« Paradis
Perdu », mes héroïnes avaient
aussi de bonnes
cuisses. C'est aussi à ça qu'on
reconnaît mes
personnages. En tous cas, je n'arrive pas à faire autrement.
Les couleurs d'Élixir sont
faites par ordinateur. A partir de quel album ce type de colorisation
a-t-il commencé?
Sur Reflet
d'Écume, c'était des couleurs directes, sans
bleu, sans
film.
La couleur de
Blood Line a été faite par ordi, et c'est
très
laid par ce que la BD a été conçue
pour rester
en noir et blanc. Même de très belles couleurs
n'auraient pas convenu. Les premières planches, ce sont des
aplats en noir, comme le font Miller ou Mignola.
Pour Paradis
Perdu, Liz utilisait des couleurs traditionelles, retouchées
à
l'ordinateur.
Pour Élixir,
les couleurs sont faites directement à l'ordinateur. Le
début
a été un peu laborieux pour la coloriste, comme
pour
moi et Christophe, car c'est un premier album. Elle bosse beaucoup
avec des gens de chez Disney, dont Barbucci et Canepa, dont elle a
été l'assistante, et qui ont continué
à
la former. Je pense qu'elle a un fort potentiel. Même si
l'album n'est pas parfait, on a une bonne coloriste.
Le deuxième
tome part beaucoup mieux, à tous les niveaux : dessin,
couleur, scénario... Je pense que ce sera un très
bel
album.
Modifies-tu ton trait en fonction de
la couleur?
Pour Élixir,
on vise un public large, et donc des couleurs vives. Je voulais que
les couleurs aient un rôle important. Je ne voulais pas
mettre
beaucoup de noir, contrairement à la Geste par exemple. Dans
le premier tome, je me suis rendu compte que le final était
un
peu clair. Je remets donc un peu plus de noir dans le
deuxième.
L'important est de doser. Je veux que la couleur ait un vrai
rôle
à jouer. J'en ai assez de faire des dessins très
noirs
auxquels la couleur n'apporte rien, voire dessert le dessin, et
réciproquement. Beaucoup de gens n'aiment pas mes albums en
couleur, car ils se demandent ce que la couleur apporte.
La couleur a un
rôle dans Élixirs. En noir et blanc, la Geste se
tient.
Élixirs, pas forcément.
Quel est ton plus grand défi
en tant que dessinateur?
Faire un album par
an, être plus régulier, plaire aux gamins.
On imagine
toujours des projets ambitieux, mais voir un gamin lire son album, et
l'aimer, c'est un beau défi.
En dehors de la
BD, je fais des illustrations. J'aimerais avoir aussi le temps de
faire plus de peinture. Je ne suis pas un peintre frustré,
mais je n'ai pas assez de temps.
Avoir le temps de
prendre du recul, ce serait un défi.
Pour moi, le plus
gros défi a été de faire un premier
album.
Bloodline était aussi un défi car il fallait
tenir sur
la longueur (136 pages). A chaque fois que j'attaque un album, c'est
un défi, car je ne suis pas sûr d'y arriver. Je ne
pense
pas être quelqu'un de doué, mais je bosse. Je suis
assez
angoissé quand je dessine. Par contre, je suis
détendu
quand j'encre.
J'aimerais être
ultra-doué, mais si c'était le cas, je pense que
je
serais un branleur (sourire). Il vaut mieux avoir un peu de mal et
travailler.
Ta plus grande joie?
Après
quatre mois d'éssai, quand Léturgie m'a
annoncé
que c'était bon, que l'éditeur était
d'accord,
et que j'allais dessiner une centaine de gags sur Rantanplan...
Quand j'arrive à
être content de mes dessins. Là, je me sens comme
une
pile électrique à l'intérieur.
Est ce qu'il y a des genres que tu
aimerais explorer?
J'aime bien tous
les genres. J'aimerais scénariser de l'intimiste, mais pas
le
dessiner. J'aurais peur de m'ennuyer. Même si le
scénario
est excellent, moi, j'ai envie que ça bouge.
Si je devais
scénariser, j'aimerais faire une histoire où il
ne se
passe rien, reposant sur les atmosphères.
J'aimerais aussi
traiter des amours romanesques, en un album – un
pavé. Il y
a eu un projet d'album de « La Belle et la
Bête »
mais dans un contexte historique, avec la guerre contre les Turcs. Il
y a eu aussi un projet sur Dracula, vraiment ambitieux. J'ai
déjà
fais quelques illustrations, mais pour l'instant c'est de
côté.
Ça se fera avec Ange.
J'aimerais bien
aussi faire des one shots. Et pourquoi pas me scénariser moi
même? Ce seraient des récits courts, par ce que
même
si je travaille depuis dix ans avec des scénaristes,
scénariser est un métier.
J'aime bien le
fantastique, évidemment... Le polar, ne en sais pas si
j'aurais envie d'en refaire.
En fait, je
m'emballe beaucoup, mais je me fatigue assez vite. Tous les genres
m'emballent. il y en a pour lesquels je veux bien bosser dix ans, et
d'autres pour lesquels un an est suffisant.
Quel regard portes-tu sur la
production de BD actuelle?
Quand on me
demande si je lis de la BD, je répond que non, parce que
ça
me rappelle trop le boulot. D'autre part, je suis resté
à
des valeurs sûres, ce que j'appelle les
« putains de
bons dessinateurs ». Je ne peux pas les
énumérer,
mais il y a les écoles espagnoles et argentines, Brecchia et
d'autres. Il y a aussi Will Eisner, par exemple, aux États
Unis. Chez les jeunes dessinateurs, il n'y en a pas beaucoup qui
m'emballent. Il y en a plein qui font du bon boulot, mais
globalement, je trouve qu'il y a un manque d'exigence, ils donnent
dans la facilité.
Je pense qu'on
publie trop d'albums. A une époque, pour faire un album, il
fallait le mériter. Il y avait beaucoup de
pré-publication,
on faisait ses premières armes dans les
périodiques.
Quand le style arrivait à maturité, on faisait un
album, une série. C'était une
récompense. Le mec
avait déjà passé dix ou vingt ans
à
dessiner. Maintenant, j'ai l'impression qu'on apprend à
dessiner en publiant un premier album.Forcément,
ça ne
peut pas être bon. J'espère que ceux dont les
albums ne
sont pas bons le savent, et qu'ils ont l'honneteté de dire :
« bon, c'est vrai, je vais
progresser » et non
« C'est bon, je suis le
meilleur! ». Ce n'est
pas le bon esprit, celui qui permet d'évoluer.
Quand je pense à
Franquin, qui, à70 ans, passait un temps fou pour un museau
de
vache... Je ne sais pas si de jeunes auteurs se posent la question...
Il est vrai que
les dessinateurs de l'époque n'avaient pas vraiment de
formation artistique. Ils arrivaient, ils dessinaient sur le tas...
C'était forcément mauvais. Le premier Tintin, par
exemple, n'est pas bien du tout. Hergé a appris par la
suite.
A l'heure
actuelle, il y a de jeunes auteurs qui ont un vrai bagage (arts
déco,
pub), mais ce n'est pas le cas pour tous; ce qui n'empêche
pas
les éditeurs de publier leurs premiers albums. Quand je vois
le mal que j'ai eu pour faire mon premier album, j'ai du mal
à
comprendre.
Il y aura
obligatoirement un revers. Quand on se rendra compte qu'il y a trop
de mauvais albums, on ralentira la production, et on refusera
peut-être des auteurs qui auraient
mérité de voir
leur premier album édité.
Il y a aussi des
dessins qui semblent moyens mais qui vont parfaitement avec le
scénario. Dans certains cas le dessinateur est
très
bon, et il minimalise son dessin, dans d'autres, il montre une
facette qui a l'air douée, mais quand on regarde dans le
détail on se rend compte que ce n'est pas bon du tout.
Certains cherchent à masquer leurs défauts, mais
quand
on s'y connait un peu on les voit quand même. Par exemple, un
premier plan bien placé cachera une main difficile
à
dessiner. Ce n'est pas du bon travail.
Est-ce qu'il y a des scénaristes
avec lesquels tu aimerais travailler?
Il y en a qui
m'ont dit vouloir travailler avec moi.
J'ai travaillé
dix ans avec Ange, et ça a été une
expérience
formidable, nous avons visité plein de domaines. Je prend
aussi beaucoup de plaisir à travailler avec Christophe. Ce
qu'il fait est carré.
Il y en a plein
avec qui j'aimerais bosser, mais je privilégierais une
relation humaine, je ne choisirais pas forcément les plus
grands scénaristes, ou ceux qui font les meilleures ventes.
Mais pour ça,
il faudrait que je bosse plus vite, pour pouvoir mener davantage de
projets.
Le plus important est le côté
humain ou le scénario apporté?
Les deux.Tu peux
avoir un copain scénariste dont tu n'aimes pas les
histoires,
mais ce sera toujours ton ami. Si il y a les deux, c'est super.
De toutes façons,
pour avoir l'idée de travailler avec quelqu'un, il faut
qu'il
se passe quelque chose à la base.
Quels conseils donnerais-tu à
un jeune dessinateur?
Il faut qu'il soit
bien sûr que c'est le métier qu'il veut faire
(sourire).
Il faut aimer viscéralement la BD. Le travail demande
beaucoup
d'efforts, et puis on peut être seul pour travailler pendant
deux ou trois ans... On travaille un peu en autiste... En tous cas
c'est mon cas. C'est un métier passionnant, mais il faut
renoncer à plein de choses.
A la base, il faut
avoir une envie incroyable de dessiner ou de raconter des histoires,
tout le temps. Et puis, il faut oublier l'idée de devenir
riche rapidement, car ça n'arrive que très
rarement.
On t'a déjà proposé
de faire des affiches de films?
Non, je n'en ai
fait qu'une seule, pour le lancement du film « La
Momie
II, le retour ». Je réalise des
couvertures de
romans, mais pas des affiches de films. C'est un domaine particulier.
EN plus, ils utilisent davantage de compositions photographiques que
d'illustrations.
Par contre,
j'aimerais bien réaliser un story board. Ce que j'aime dans
la
BD, c'est la mise en scène. Quand je lis un
scénario,
je vois les scènes défiler comme au travers d'une
caméra, les plans qui s'enchaînent.
J'ai eu une fois
l'occasion de faire un story board pour un petit court
métrage.
Ça a été une expérience
très
enrichissante.
Lis-tu les romans dont tu illustres
la couverture?
Non, on me livre
le roman et on m'explique l'histoire. Le romancier et
l'éditeur
ont en général une bonne idée de ce
qu'ils
veulent voir apparaître.
C'est très
plaisant.
Que penses-tu de la réputation
que te donnes Dav à travers les aventures du Studio
Gottferdom?
Au début,
je trouvais ça salaud, et puis maintenant, je suis fier
d'être
dans ses pages car Dav est un type qui mérite
d'être
connu.
Il y un peu
d'exagération dans ce qu'il dessine. Tout n'est pas faux,
mais
un peu éxagéré... (sourire)
Merci beaucoup, Alberto!!